dimanche 16 décembre 2018

Mystique sur Amstrad CPC


Mystique est un obscur RPG sorti exclusivement sur Amstrad CPC en 1987 par Excalibur, une boîte Française tout aussi obscure, du moins pour ceux n'ayant pas joué sur Apple II ou Amstrad CPC dans les années 80. On lui doit une poignée de jeux d'aventure dont la marque de fabrique était de ne jamais adapter les graphismes sur Amstrad et Atari ST, ils avaient toujours ce petit côté tramage/faible résolution et ce style naïf propre aux productions de l'Apple II.

Malgré la mobilisation de la communauté via le Facebook, impossible de vous parler de l'auteur qui n'est pas crédité et qui semble avoir également travaillé sur un autre jeu de l'éditeur, l'Antre de Gork. De plus, je n'ai pas la notice non plus, ça commence bien...
 
Si l'on se réfère aux captures écran du jeu qui se cachent dans les tréfonds du net, Mystique est un jeu d'aventure. En revanche, dès le jeu lancé, on se rend tout de suite compte que l'on est bien en face d'un RPG puisque l'on doit créer une équipe d'aventuriers :


Une fois la partie lancée, on peut aller glaner des infos à l'auberge du village, passer chez l'armurier pour faire ses courses et allez au temple pour se voir confier une mission par les prêtres. Il est question d'aller récupérer un bouquin dans un labyrinthe pour gratter un indice auprès d'un ermite et vaincre un terrible dragon ou un truc dans le genre...

Dans le dédale, la progression se fait à la première personne dans un environnement en fil de fer et ce, dans un calme relatif, troublé à l'occasion de combats. Ces derniers sont au tour par tour et c'est là que le bât blesse. En effet, entre les ennemis de base qui arrivent à occire des combattants aux stats élevés et pourtant lourdement équipés aux magiciens dont les sorts ne sont pas reconnus par le programme, c'est la consternation !

 

C'est pour ça que je regrette de ne pas avoir la notice car j'aime à penser que j'ai loupé une évidence, non, ce n'est pas possible, on a pas pu sortir un jeu avec un système de combat buggé jusqu'à la moelle, je dois pas savoir comment m'y prendre, il y a forcément une autre explication ?

Et c'est la raison pour laquelle j'ai décidé d'aborder ce jeu sous la forme d'un texte écrit et non pas d'une vidéo. Il me reste encore un peu d'amour propre et qui ça amuserait de me voir mordre la poussière face à des ennemis "bas de gamme" ? Ne répondez pas...


Bref, en l'état Mystique promet plus qu'il ne tient et ne mérite pas votre attention, quant on pense qu'une suite était prévue...

lundi 3 décembre 2018

Interview de Michel Bouat, auteur de Traffic et Chevalier Arthur de Loriciels sur ZX81

C'est dans un restaurant traditionnel et particulièrement prisé du centre-ville de Nantes, Chez Maman, que j'ai eu l'occasion, pour vous, d'interview Michel Bouat.

Auteur de jeux vidéo sortis au début des années 80 sur ordinateur ZX81, grâce à la magie de Messenger, retrouvez ci-dessous ses anecdotes durant la période Loriciels :


[Blood] Bonjour Michel, pouvez-vous commencer par vous présentez ?

[Michel Bouat] En fait aujourd'hui je suis un papy et pas un geek, j'ai 68 ans et j'ai écrit les programmes Traffic et Chevalier Arthur en 83 et 84 quand j'étais à Paris comme ingénieur EDF aux services centraux après avoir débuté comme ingénieur de démarrage à la centrale de Bugey en 1976. Ma femme était enceinte de notre troisième enfant et elle se couchait tôt, ce qui a fait que j'avais de longues soirées à pouvoir bidouiller sur mon ZX 81 qui a été mon premier "ordinateur".

A Paris j'ai trouvé un livret en anglais qui présentait la structure interne du ZX81 et la façon de le programmer en langage machine ainsi qu'un livre un peu plus gros présentant les instructions de Z80.

[Blood] Comment en êtes-vous venu à vouloir faire des jeux ?

[Michel Bouat] J'ai commencé par écrire des sous programmes qui permettaient de faire des animations. A l'époque, j'avais un voisin qui travaillait sur les ferries avec l'Angleterre et qui avait aussi un ZX81 et qui ramenait des magazines présentant des jeux. La conception des jeux était plus pour moi une distraction je dirais technique.

En fait mon côté professionnel n'était pas orienté informatique. Dans mes études j'ai eu l'occasion de programmer en Fortran sur un IBM 1130. Début des années 80, c'était aussi la période des jeux style Dungeons & Dragons, que je trouvais aussi amusant.

[Blood] Traffic était donc votre premier jeu ? Comment est-il né ?

[Michel Bouat] Je n'en ai écrit que 2 il faut dire que le stockage des données sur bande magnétique n'était pas très performant et très long.

J'avais voulu faire une sorte de Frogger, il faut dire qu'il n'y avait pas beaucoup de jeux en langage machine à cette époque mais la seule solution si on ne voulait pas saturer rapidement la mémoire et conserver une grande rapidité d'exécution.


[Blood] Quel âge aviez-vous ?

[Michel Bouat] 33/34 ans
ça a bien changé, lol

[Blood] Une fois le jeu terminé, comment avez-vous contacté Loriciels ?

[Michel Bouat] J'avais vu sur Paris qu' 'il y avait Loriciels qui venait de se créer il y avait peu de temps et je suis allé les voir (M.Bayle) pour leur proposer Traffic un peu au hasard. A l'époque il y avait surtout des jeux en basic.

[Blood] Ok, et alors, comment ça c'est passé, il vous a demandé de changer des trucs ?

[Michel Bouat] Non ils l'ont pris directement sans modifs.

[Blood] Vous souvenez quel contrat vous a-t-il fait signer ? Je veux dire, conserviez-vous les droits ?

[Michel Bouat] A l'époque je faisais ça pour le fun, je n'en avais pas besoin pour vivre. On avait convenu du montant des royalties et régulièrement ils me faisaient un chèque. Je ne me rappelle plus du montant des rémunérations mais je crois me rappeler que les 2 jeux m'ont rapporté 1200 francs et quelques (368€) . Je pense même que j'ai dû payer des impôts dessus.

[Blood] Combien d'exemplaires.se sont écoulés ?

[Michel Bouat] Entre 500 et 1000 il me semble.

[Blood] Entre 500 et 1000 juste pour Traffic ?

[Michel Bouat] Pour les deux, en tout cas ça nous a permis à ma femme et à moi de nous payer 2 blousons en cuir sur mesure !!!Après ils disposaient d'un certain nombre de jeux sans rétribution.

[Blood] Jeux sans rétribution, c'est à dire ?

[Michel Bouat] Ils distribuaient une cinquantaine de jeux sans me rétribuer je crois mais c'était dans le contrat. Au bout d'un moment, les vents faiblissant, je pense que j'ai du abandonner les droits.

[Blood] Qu'entendez-vous par abandonner les droits ?

[Michel Bouat] Quand il n'y a plus de vente je n'en attendais plus rien. C'était quand même quelque chose d'artisanal et je n'étais pas auto entrepreneur.

[Blood] Ok, donc après Traffic il y a eu Chevalier Arthur, quelles sont les inspirations cette fois-ci ?

[Michel Bouat] Arthur et inspiré des jeux du moment qui apparaissaient : mélange d'arcade et d'aventure.

 [Blood] Vous avez parlé de Dungeons & Dragons, c'est une inspiration également ?

[Michel Bouat] Oui je m'intéressais à ce genre de jeu un peu par culture. Je pense qu'à l'époque mes sources relatives à la culture D&D étaient entre autres les numéros spéciaux de Jeux et Stratégie et des livres provenant de la boutique Descartes du quartier Latin.

[Blood] Que pouvez-vous me dire sur son développement, la petite histoire derrière Arthur ?

[Michel Bouat] Comme j'ai dit, il y avait des séquences arcade mélangées à un circuit aventure avec des devinettes ou des aspects mémoriels.

En fait Arthur est la suite de Traffic donc je n'ai fait que réutiliser les routines de base créées pour l'affichage, les déplacements et les interactions avec une introduction de paramètres aléatoires. Il y a des principes que l'on a retrouvé dans les livres dont on est le héros. J'ai fait ce que j'ai pu aussi avec les possibilités graphiques qui étaient quand même limitées.

J'ai parcouru les échanges que vous avez eu pour déplomber Arthur, beau travail et superbe persévérance. J'ai vu que quelqu'un disait qu'Arthur était programmé dans un grand bazar, en fait il faut savoir que j'ai récupéré une partie de la programmation de Traffic (routines d'affichage, de déplacement, générateur aléatoire, interactions entre objets, etc..) en conservant des parties qui avaient un lien avec des adresses fixes, sans les réécrire.

Sinon je n'ai pas utilisé de compilateur mais j'ai écrit les programmes instruction après instruction. 

[Blood] On peut voir des similitudes avec Mazogs, vous confirmez l'influence ?

[Michel Bouat] Je connaissais Mazogs et j'y avais joué à l'époque et il avait été sans doute une source d'inspiration plus pour Arthur que pour Traffic, mais rendons à César ce qui lui appartient. La cassette de Mazogs avait été achetée en Angleterre par mon voisin de l'époque dont je vous ai parlé.

[Blood] Donc Traffic, Arthur puis plus rien. Vous ne vouliez plus faire de jeux. ?

[Michel Bouat] Disons que je ne voulais plus m'emmerder avec une bécane comme le ZX81 où à chaque plantage dans la programmation il fallait recharger à partir du magnétophone, en plus j'avais une famille avec trois enfants et un boulot qui me prenait 55 minutes de déplacement aller/retour entre le Pecq et la rue de Messine. Après j'ai montré quelques jeux à mes enfants sur un Atari...

[Blood] Ce qui est tout à fait entendable. Donc finalement, il n'y a pas eu de jeux en cours de projet ? Vous avez juste tourné la page ?

[Michel Bouat] Absolument

[Blood] Et avec le recul, y a-t-il des aspects du ZX81.dont vous gardez un bon souvenir ?

[Michel Bouat] La possibilité de le pousser grâce au langage machine. Un peu comme certains actuellement qui bricolent et programment des petits robots.

[Blood] Aujourd'hui, vous êtes à la retraite. Y a-t-il un projet dont vous souhaitez parler ?

[Michel Bouat] J'en profite pour peindre par périodes, organiser des voyages avec mon épouse et des amis.

[Blood] Un petit mot pour ceux qui ont joués à vos jeux et pour le groupe Facebook ZX81 France, dernier bastion des aficionados français du ZX81 ?

[Michel Bouat] J'espère qu'ils y ont pris beaucoup de plaisir à y jouer comme moi j'en ai eu à les programmer. J'ai trouvé un site où l'on trouve Traffic on line sur lequel on peut jouer mais pas Arthur ou alors à travers un émulateur peut-être qui permettrait à tous de le redécouvrir.

[Blood] C'est noté, j'en profite pour préciser qu'Arthur a été dumpé pour la première fois il y a juste quelque mois donc je pense que c'est la raison pour laquelle il n'est pas encore proposé sur ce format.

[Michel Bouat] J'avoue que ce n'est que récemment que je suis tombé par hasard sur des sites comme le votre. Bon courage et félicitations pour votre action à faire revivre ces machines et ces programmes.

[Blood] Merci bien.

Interview réalisée par Blood le 3 Décembre 2018 pour le Blog Arkalys Project. Encore merci à Michel Bouat pour son travail et pour avoir eu la gentillesse et la patience de m'accorder cette interview.